dimanche 8 février 2009

l'affront d'Yves Jégo


DES NOUVELLES DU FRONT DE GUADELOUPE
19ème JOUR DE GREVE GENERALE (2ème épisode): COUP DE THEATRE !


L'accord possible sur l'augmentation de 200 euros, dont Elie Domota, porte-parole du collectif LKP, parlait dans son entrevue accordée à Chien Créole en début d'après-midi, n'aura finalement pas été signé. Et pour cause, l'Etat, qui avait déjà indigné la Guadeloupe en interrompant les négociations engagées par le préfet, vient encore d'infliger une giffle à la Guadeloupe. Le secrétaire d'Etat à l'Outre-Mer, Yves Jégo, avait donné rendez-vous à 17h00 au collectif, aux élus, et aux socioprofessionnels. Il ne s'est finalement pas présenté à la préfecture. A 17h00, il embarquait en toute discrétion dans un avion pour Paris ! A l'heure où j'écris ses lignes, il ne doit plus en être bien loin. Les seuls qui ont pu obtenir une explication sont Yvelise Boisset de Canal 10 et les journalistes de Radio Guadeloupe qui l'ont joint par téléphone et à qui il a expliqué qu'il ne fuyait pas mais qu'il partait à Paris pour défendre le projet négocié entre les différentes parties.

Invité aux actualités de RFO, Elie Domota a rappelé en créole que le secrétaire d'Etat avait toujours déclaré avoir un mandat pour négocier les points de la plateforme connus de Matignon depuis la mi-décembre ! Tout le monde ici est abasourdi et la colère commence à monter contre ce qui est considéré à juste titre comme un nouvel affront de l'Etat. Et pourtant, tous avaient souligné les bonnes dispositions de M. Jégo depuis son arrivée, pour parvenir à une issue acceptable par toutes les parties. Du coup, chacun se demande si les 108 millions promis dans ce dossier par l'Etat ne risquent pas d'être finalement refusés par le gouvernement Fillon, puisque le secrétaire d'Etat lui-même a expliqué à la radio la nécéssité de "défendre" ce projet. C'est donc qu'il est, au moins potentiellement, remis en cause.

Les deux présidents des collectivités territoriales, M. Gillot président du Conseil Général et M. Lurel, président du Conseil Régional, très graves, ont appelé sur l'antenne de RFO à durcir la mobilisation. "Il faut que demain les bâtiments publics, les écoles, les mairies, mais aussi tous les commerces soient fermés" a appelé M. Gillot. Il rejoint ainsi M. Domota qui demande aux Guadeloupéens une paralysie totale de la Guadeloupe jusqu'à ce que des réponses sérieuses soient apportées à la plateforme de revendications. Depuis le début du conflit, le collectif avait sommé les deux élus de choisir leur camps, il semble que ce soir, un pas ait été franchi dans ce sens. On s'attend demain à des blocages vraiment massifs et manu-militari de toutes les enseignes et administrations qui spontanément ne se joindraient pas à la grève. Pendant ce temps-là, en Martinique, des syndicalistes envahissent les centres commerciaux et permettent aux clients de partir avec leur caddies remplis sans payer et ce alors que la grève générale s'étend, là-bas aussi. M. Jégo ne devrait pas tarder trop longtemps avant de revenir, car la situation pourrait devenir incontrôlable.

On s'interroge sur les véritables motivations qui ont poussé Jégo a partir si précipitamment. Fillon lui aurait demandé de rentrer sur Paris pour faire le point avec lui. Osons une autre hypothèse. Les négociations commencées hier à 10h00 du matin, et qui se sont achevées ce matin à 07h00, soit après 21 heures de délibérations, ont peut-être montré leurs limites. Les patrons refusent de lâcher le moindre centime. Yves Jégo voyant leur entêtement, n'a t'il pas pris l'initiative de rentrer à Paris pour tenter de convaincre Fillon de prendre en charge la part qui au terme de ces négociations était censée incomber au patronat? Il est peut-être plus important pour ce gouvernement de désamorcer un conflit de plus en plus gênant, quelqu'en soit le prix, plutôt que de taper du poing sur la table et de se fâcher avec ses amis békés ou de laisser la situation dégénérer ?..

Si tel était le cas et même si par ce biais la revendication des 200 euros devait être atteinte, espérons que le collectif aura la dignité de refuser car ce serait un marché de dupe. Au lieu de faire payer les patrons irresponsables et coupables en grande partie de la situation dramatique de la Guadeloupe, c'est avec notre argent, celui de l'Etat donc de nos impôts que nous nous augmenterions sans que les Hayot, Vivies et consors n'aient à verser le moindre centime! Non, préférons ne pas imaginer que c'est ce qui se trame dans notre dos...

FRédéric Gircour